Vers -110 millions d’années, des sables verts se sont déposés au fond de la mer. Quelques millions d’années après, la “Provence” s’est retrouvée hors de l’eau.
L’ocre un pigment naturel d’origine minérale présentant une palette infinie de nuances allant du jaune pâle au rouge vif. La roche d’où est extraite l’ocre est une formation sableuse constituée d’environ 80% de grains de quartz. Les particules de taille inférieure à 0,04 millimètres qui sont intercalées entre ces grains correspondent à l’ocre proprement dite.
Elle est composée :
Dans les années 1970, à partir d’une série d’études sur le Vaucluse et le Gard et par comparaison avec des formations géologiques analogues en Afrique, les mécanismes de la formation des sables ocreux sont mis en évidence par Jean-Marie Triat.
Il publie sa thèse " Paléoatérations dans le Crétacé supérieur de Provence rhodanienne", en 1979. Son ouvrage, Les Ocres (CNRS Editions) publié en 2010 est une référence.
L’ocre provient d’une roche sédimentaire d’origine marine. Sa formation se passe à la fin du Mésozoïque (ère secondaire) dans une Provence très différente de celle d’aujourd’hui.
En effet, durant la majeure partie du Mésozoïque, la mer recouvre la Provence. D’épaisses couches de roches sédimentaires (calcaires, argiles, marnes, grès, etc.) s’accumulent. Il y a 120 millions d’années, des marnes grises se déposent ; en 1840, Alcide d’Orbigny définira l’étage" Aptien" de l’échelle des temps géologiques à partir de ces marnes identifiées dans la localité d’Apt.
Vers -110 millions d’années (Albien), des sables issus de l’érosion du Massif Central viennent s’accumuler au fond de la mer. Ils sont composés de grains de quartz et de micas. Le calcaire issu des organismes marins se mêlent au sable ainsi qu’un nouveau minéral argileux de couleur verte qui se forme à l’interface eau/sédiment, la glauconie. Après consolidation, une nouvelle roche est née : un grès vert glauconieux.
Vers -100 millions d’années (Albien-Cénomanien), à la faveur de mouvements tectoniques, un vaste pli entre Massif Central et massif des Maures se met en place, le bombement durancien. La mer se retire d’une partie de la Provence et les grès verts glauconieux du Pays d’Apt se trouvent émergés. Le climat est tropical humide. La chaleur et les fortes pluies entraînent des réactions chimiques intenses au sein des grès verts. Le calcaire, les micas et la glauconie, instables dans ces nouvelles conditions, sont altérés et libèrent leurs éléments chimiques. Ceux-ci se combinent pour former de nouveaux minéraux plus stables qui constituent l’ocre : la kaolinite, la goethite et l’hématite. L’altération a pu se réaliser.
Dans le paysage, cette altération constitue un profil type constitué de bas en haut des grès verts glauconieux, des sables ocreux, de sables blancs et d’une cuirasse ferrugineuse qui coiffe l’ensemble.
Par la suite, au Cénozoïque, les sables ocreux ont été recouverts de nouvelles couches sédimentaires.
Ce sont les déformations tectoniques qui ont donné naissance aux massifs provençaux (phase pyrénéo-provençale, phase alpine) et l’érosion intense du Quaternaire qui sont à l’origine du paysage des ocres, avant que les habitants taillent de grandes parois pour l’exploitation des sables ocreux.
La nature, puis l’homme sont à l’origine de ces paysages si singuliers. Quand l’histoire géologique est lisible dans un paysage, elle nous donne un certain vertige avec ses millions d’années et ses phénomènes prodigieux, qui nous replacent dans un instant où notre condition de passager furtif est palpable. Nous ne sommes nés que dans ces dernières minutes.
Quelques dates à retenir :